Une offre initiée en mars, mais stoppée par l’État français
Logo de Dailymotion - Copyright Dailymotion
En 2011, l’État français s’était désengagé de Dailymotion lorsque le FSI (Fonds Stratégique d’Investissement)(1) avait vendu sa part. Il surveille néanmoins de près l’évolution du capital de Dailymotion par le biais d’un autre fonds, le FSN-PME(2), dont l’objectif principal est « d’intervenir sur des opérations d’investissement “avisé” en fonds propres et/ou quasi-fonds propres dans des PME développant de nouveaux usages, services et contenus numériques, avec l’objectif de financer des projets rentables »(3). Pour les dirigeants de Dailymotion, l’objectif est d’investir 50 millions d’euros afin de consolider leur position sur le marché et d’accélérer leur croissance. Afin de répondre à ce besoin, et pour diversifier l’actionnariat, France Télécom avait émis l’hypothèse d’un rapprochement avec une société outre-Atlantique. Yahoo! qui s’était positionné dès mars comme un acteur vivement intéressé proposait de reprendre entre 75 et 100 % de la société française. Mais, le gouvernement – particulièrement Arnaud Montebourg – a récemment incité Orange à stopper les pourparlers et le PDG d’Orange, Stéphane Richard n’a pas souhaité se fâcher avec l’État qui, rappelons-le, détient plus de 27 % de la société. Les discussions ayant pour finalité de céder une grande part du capital de Dailymotion sont donc abandonnées. Orange resterait cependant ouvert à toute proposition.
L’intervention d’Arnaud Montebourg
Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif serait ainsi intervenu pour stopper les négociations permettant un accord entre Yahoo! et Orange France pour l’acquisition de Dailymotion. Un désaccord est par ailleurs très vite apparu entre M. Montebourg et le ministre de l’Économie et de finances, M. Moscovici. Le second soutenant qu’aucune « décision conjointe » n’avait été prise au sujet du dossier.
Mais ce que l’État français redoute par-dessus tout, c’est qu’une entreprise américaine obtienne une trop grosse part dans l’actionnariat de Dailymotion. En souhaitant prendre au minimum les trois quarts des parts de la société, Yahoo! a alerté le gouvernement qui a donc bloqué les discussions en faisant pression sur Orange. La France ne cherche pas toutefois à se prémunir de l’introduction de sociétés américaines dans le capital, mais elle semble rester réticente à une possession majoritaire des actions par une entreprise située outre-Atlantique. Par ailleurs, Yahoo! n’était pas le seul repreneur potentiel. Des offres auraient été émises de la part de Microsoft et d’un fonds d’investissement américain.
Mais ce que l’État français redoute par-dessus tout, c’est qu’une entreprise américaine obtienne une trop grosse part dans l’actionnariat de Dailymotion. En souhaitant prendre au minimum les trois quarts des parts de la société, Yahoo! a alerté le gouvernement qui a donc bloqué les discussions en faisant pression sur Orange. La France ne cherche pas toutefois à se prémunir de l’introduction de sociétés américaines dans le capital, mais elle semble rester réticente à une possession majoritaire des actions par une entreprise située outre-Atlantique. Par ailleurs, Yahoo! n’était pas le seul repreneur potentiel. Des offres auraient été émises de la part de Microsoft et d’un fonds d’investissement américain.
Quelle perspective aux États-Unis pour Dailymotion ?
L’objectif d’un tel rapprochement est pourtant simple. Malgré un positionnement aux États-Unis depuis 2009 à New York, puis San Francisco, Dailymotion reste en marge face au géant de la vidéo en diffusion libre sur Internet racheté par Google : YouTube. Concurrent sérieux, la société française n’en demeure pas moins très loin derrière, s’inscrivant à la 31e place en terme d’audience, regroupant 116 millions de visiteurs uniques chaque mois, contre plus d’un milliard de visiteurs uniques par mois pour YouTube (depuis le début de l’année 2013). Le français a clairement besoin d’un partenaire pour sa croissance internationale et un investissement. Mais comment s’en donner les moyens en ne retenant que la participation de Fonds nationaux, trop peu flexibles et ne constituant qu’une solution temporaire ? D’autres plateformes traditionnelles, françaises, pourraient venir se porter acquéreur pour diversifier leurs activités comme Canal+, TF1, France Télévisions. Et cela pourrait venir particulièrement concurrencer les activités de YouTube qui lancera des chaînes payantes (Google est propriétaire de YouTube depuis 2006 et a réussi son développement).
La croissance externe de Yahoo! depuis la nomination de Marissa Mayer est fondamentalement tournée vers des acquisitions de start-up et de petites sociétés afin de diversifier son offre face au géant Google. Foncièrement, Yahoo! cherchera à développer (ou plutôt à acquérir) une plateforme de lecture de vidéos sur Internet afin de concurrencer YouTube qui appartient à Google. On peut douter de la pertinence du mouvement stratégique opéré par le ministre du Redressement productif. Car Yahoo! aurait pu donner les moyens à Dailymotion de croitre et de s’implanter durablement sur le marché américain.
La croissance externe de Yahoo! depuis la nomination de Marissa Mayer est fondamentalement tournée vers des acquisitions de start-up et de petites sociétés afin de diversifier son offre face au géant Google. Foncièrement, Yahoo! cherchera à développer (ou plutôt à acquérir) une plateforme de lecture de vidéos sur Internet afin de concurrencer YouTube qui appartient à Google. On peut douter de la pertinence du mouvement stratégique opéré par le ministre du Redressement productif. Car Yahoo! aurait pu donner les moyens à Dailymotion de croitre et de s’implanter durablement sur le marché américain.
L’évasion des leaders d’Internet vers les États-Unis et l’Asie
Deux tendances s’affrontent. La première consiste à penser que le marché des États-Unis est essentiel, et que la question d’un partenaire américain n’en est pas une option, mais plutôt un besoin vital dans le développement international du fournisseur de contenus vidéos Internet français. Yahoo! souhaitait devenir actionnaire majoritaire, ce qui a provoqué les réticences de l’État. Serait-il possible de trouver un partenaire qui accepte de rester minoritaire ? La deuxième tendance tend à souligner l’évasion des grands noms européens d’Internet vers des investissements outre-Atlantique, comme ce fut le cas pour Deezer, PriceMinister ou encore Skype. Les États-Unis ne sont cependant pas la seule source d’achat partiel ou total de sociétés dans le domaine numérique. L’Asie est aussi une grande actrice dans le domaine. Aussi, et même si le rachat d’action par des investisseurs étrangers ne signifie pas forcément une perte d’autonomie, ne doit-on pas craindre un délitement de l’industrie numérique européenne ? La perte d’une autonomie d’un marché porteur et stratégique peut être un risque à prendre pour continuer le développement économique de la France, particulièrement à l’étranger. En attendant, il reste une situation délicate dans laquelle un entre-deux pourrait figer toute avancée. C’est peut-être cela dont a besoin Dailymotion pour assurer son développement.
(1) Fonds créé afin d’aider les entreprises françaises ayant besoin d’investisseurs stables pour financer leurs projets de développement.
http://www.fonds-fsi.fr/
http://www.fonds-fsi.fr/
(2) Fonds national pour la Société Numérique.
(3) http://www.caissedesdepots.fr/activites/investissements-davenir/les-projets-finances/programme/fsn-pme.html