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Jean-Charles Naouri, chef d’orchestre de marques responsables




Mardi 24 Décembre 2019


A 70 ans, Jean-Charles Naouri a un parcours hors normes. Rien ne le prédestinait à devenir le PDG du Groupe Casino, géant de la grande distribution française. Guidé par des valeurs personnelles très fortes, Naouri s’est imposé en grand bâtisseur et en homme d’affaires avisé.



Jean-Charles Naouri
Jean-Charles Naouri
Jean-Charles Naouri a tout du personnage de roman. Il a bâti un véritable empire dans le monde de la grande distribution française, et même internationale. Si vous passez la porte d’entrée d’un Casino, d’un Géant, d’un Monoprix ou même d’un Monop’, d’un Franprix, Leader Price, Spar, Vival ou d’un Sherpa, d’un Naturalia pour les amateurs de bio, ou si vous commandez un livre sur Cdiscount.fr, vous passez par M. Naouri, actionnaire majoritaire du groupe. Il préside en effet la foncière Euris SAS qui détient le Groupe Rallye qui lui-même détient 51,3% de Casino. Sous sa présidence, le groupe fer de lance de la ville de Saint-Etienne a grandi, à grands coups d’emprunts et d’investissements. En 2018, le Groupe Casino a affiché un chiffre d’affaires de 36,6 milliards d’euros. Mais avant d’en arriver là, l’histoire vaut un petit retour en arrière.
 
Ascension public-privé
 
Jean-Charles grandit en Algérie, dans une ville qui s’appelle encore à l’époque Bône. Un père pédiatre, une mère agrégée d’anglais, un frère devenu comme lui homme d’affaires. Normalien, diplômé de l’université américaine Harvard et de l’Ecole nationale d’administration (ENA), Jean-Charles Naouri est un étudiant brillant en mathématiques dans les années 70. Armé d’un doctorat, il devient inspecteur des finances et entre au service de l’Etat à partir de 1982 en tant que directeur de cabinet du ministre des Affaires sociales et de la Solidarité nationale, Pierre Bérégovoy. En 1984, Naouri suit Bérégovoy au ministère de l’Economie, des Finances et du Budget, jusqu’à la première cohabitation. En 1986, il publie déjà son Livre blanc sur la réforme du financement de l'économie. L’homme réfléchit aux modèles de la société. Il bifurque alors vers le privé en rejoignant la banque d’affaires Rothschild & Cie en tant qu’associé-gérant. Parallèlement, il crée une société d’investissement, Euris, qui prend des participations dans des entreprises françaises, dans le domaine de l’industrie et de la distribution. Les années passent et les investissements sont de plus en plus nombreux.
 
En 1991, alors que la gauche est revenue à Matignon, il reste dans le privé en se spécialisant dans le secteur de la grande distribution. Premier pas : il rachète l’entreprise bretonne Rallye qu’il apporte en dot à Casino. La greffe prend et Jean-Charles Naouri devient le premier actionnaire du groupe en 1992. Son arrivée est un électrochoc positif : durant les cinq premières années (1992-1997), le groupe double son chiffre d’affaires. Dès la fin des années 90, il a la bonne intuition d’orienter ses enseignes du groupe Casino vers le commerce de proximité. Cela passe par l’acquisition de nombreuses enseignes que le groupe va remettre en selle : Franprix, Leader Price, Monoprix et le site de e-commerce Cdiscount qu’il rachète en 2000. Naouri devient officiellement président directeur général en 2005.
 
La vision d’un grand industriel
 
Il ne faut pas s’y tromper. La grande distribution est une véritable industrie, et Jean-Charles Naouri en est l’un des grands chefs. L’homme a une vision : d’abord celle de l’indépendance et de l’image d’un groupe attaché à ses racines stéphanoises. Ensuite celle d’un homme d’affaires qui a su anticiper les grandes (r)évolutions que traverse le secteur de la distribution. Le passage au digital s’est fait naturellement, en étant même l’un des acteurs majeurs de l’e-commerce avec Cdiscount, nº2 du marché hexagonal derrière l’intouchable Amazon.
 
Grâce à son portefeuille d’enseignes, il couvre toutes les clientèles, entre hypermarchés de zones périphériques des villes et les boutiques de taille moyenne ou petite en centre-ville et ce, selon toutes les gammes, du hard discount au premium. Ces quinze dernières années, le groupe a misé sur sa diversification, clé d’un développement relativement rapide. Cette diversification est aussi géographique puisque le groupe est fortement implanté en Amérique du Sud. En 2018, le groupe réunissait 220 000 salariés, 8962 magasins en France et 3147 en Amérique latine. Le Groupe Casino est même le nº1 de la grande distribution brésilienne. Naouri a eu du flair. En 2013, il est d’ailleurs nommé par le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius comme « représentant spécial pour la relation économique avec le Brésil ». Mais les honneurs ne s’arrêtent pas là.
 
Engagement responsable et avenir durable
 
Officier de la Légion d’Honneur, Jean-Charles Naouri n’a pas attendu que les acronymes CSR ou RSE soient à la mode pour s’engager, en tant que grand patron, dans le développement durable et humain. Les méthodes de ressources humaines ont été parmi les premières à changer sous l’impulsion de l’équipe en place. Cela passe par le processus de recrutement basé sur les compétences et par le plan Handipacte en faveur des personnes à mobilité réduite. Le groupe Casino prouve cet engagement, en présentant un taux d’emploi à 9,80% (le taux légal est de 6%). En 2009, le groupe avait ainsi reçu son premier Label diversité. Naouri a également créé des fondations pour le groupe Casino et pour son entreprise Euris, finançant ainsi des aides aux enfants malades, des bourses pour des étudiants prometteurs et des aides au financement pour les créations d’entreprise innovantes. « Innover, c’est aussi développer des solutions durables, qui permettent de réduire notre empreinte environnementale, professe Jean-Charles Naouri. Nous devons faire vivre un état d’esprit agile, irrigué en permanence par l’innovation, ouvert à la diversité et nourri par des pratiques de management bienveillantes. » Parole d’un chef d’orchestre, dont la petite musique trouve désormais des échos bien au-delà de son seul secteur d’activité.

La Rédaction



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