Illustration : IngImage
L’entreprise est aujourd’hui présente dans 35 pays et poursuit sa stratégie internationale, avec 90 % de son chiffre d’affaires hors de France (25 % sur le continent américain et 10 % en Asie).
Comment expliquer cette ascension (1)? La clé principale du succès semble résider dans le choix de l’innovation continue autour de produits centraux et d’une stratégie de diversification concentrique sur les activités sportives en extérieur.
La réussite de l’entreprise ne peut se comprendre sans saisir la permanence d’une culture fondée sur l’inventivité et les solutions transversales. Il existe dans l’histoire de la marque, une culture combinatoire en matière de compétences clés, qui permet de créer différentes gammes, à partir d’un même "produit central".
En effet, l’entreprise parvient, depuis ses origines, à puiser dans ses ressources (technologies, culture-produit, orientation marché) et ses capacités organisationnelles, pour proposer des produits centraux, à l’instar de l'emblématique norme SNS en ski de fond ou du ski monocoque (2).
Il s’agit de mettre sous tension ses équipes, en stimulant la créativité, à partir d’une valorisation de compétences clés (veille marketing, savoir faire industriel, politique brevets, gestion des réseaux de distribution) et de "produits centraux" (core products) que l’entreprise va pouvoir ensuite décliner en différentes lignes d’activités (end products).
L’objectif de la firme est d’amortir aussi largement et rapidement que possible ses compétences clés, en les exploitant de façon optimale. Cette construction passe par la constitution d’équipes soudées et passionnées de sport et une séparation stricte entre les choix stratégiques de l'entreprise (le siège social et le centre de R&D sont situés à Annecy) et les décisions opérationnelles (les produits sont industrialisés en Europe et en Asie).
Dans les bureaux d’Annecy, près de 300 personnes (ingénieurs en innovation, spécialistes d’internet, créatifs…) sont dédiées à la créativité et à l’innovation autour d’une culture de l’échange et de la comparaison, rendue possible par d’importants moyens techniques (composite, injection plastique, mécanique, thermo soudure, découpe et couture, maîtrise CAO/FAO...).
Salomon a misé également sur la diversification concentrique, en passant d’une marque 100% sport d’hiver à une marque de matériels, de chaussures, de vêtements de sports d’extérieur multi-saison, activités qui ont connu une progression de 10 % en 2015.
Ainsi, des synergies existent, permettant d’élargir le métier de base à des métiers connexes ayant un lien technique (« matériel-chaussure-fixation ») ou commercial (« Equipements-textile »), en vue de devenir l'un des leaders mondiaux des pratiques sportives en extérieur (« Jouons dehors »). L’entreprise cherche ici à conquérir de nouvelles positions à l’international (Etats-Unis, Japon, Canada, Scandinavie) en maintenant une cohérence ou complémentarité élevée entre les activités.
L'entreprise continue aujourd'hui sa politique d'innovation (avec de nouveaux relais de croissance: casques, masques...) et de diversification en misant notamment sur le trail running (marché des courses dans un environnement nature: montagne, désert, forêt, plaine).
Le cas Salomon montre ainsi la capacité de certaines entreprises à se régénérer dans un environnement hautement concurrentiel (3) , en misant sur une combinaison de ressources, pour parvenir à maintenir un cap et permettre le renouvellement de ses propres stratégies.
Notes
(1) Le marché des articles de sport été ou hiver est complexe car il requiert des compétences variées et complémentaires tant sur le plan technique (mécanique, métallurgie, biens d’équipement….) que commercial (légèreté, sécurité, résistance aux chocs, design…).
2) On peut également citer le Bubble shaft de Taylor Made (diversification dans les clubs de golf en 1984) ou la paire de roues Mavic R6 dans les composants pour cycle (diversification dans les jantes de vélos haut de gamme en 1994), à chaque fois construits autour d’une innovation architecturale, d’un marketing sélectif et d’une politique d’industrialisation rigoureuse.
(3) Meier O., Diagnostic stratégique: évaluer la compétitivité de l'entreprise, Editions DUNOD, 4ème éd., 2015.