Louis Bernard, Directeur de Layer Cake : « La formation par l’action est la clé d’une bonne gestion de crise ».



Vendredi 20 Avril 2012


Louis BERNARD est le fondateur de Layer Cake, un organisme de formation basé sur la simulation, les jeux de rôle et les serious games. Ayant travaillé au sein de la cellule de crise du Ministère des Affaires Étrangères, chez AXA Assistance puis dans le groupe GEOS, il a une large expérience de la prévention des risques et de la gestion des crises sur des terrains très différents. Pour lui, la simulation et l’enseignement comportemental sont la meilleure solution pour traiter les problématiques de gestion de crise. Il s’en explique dans les colonnes de Carnets du Business.



Les Carnets du Business : S’il y a un mot qu’on a beaucoup entendu ces dernières années, c’est le mot «crise». Qu’entend-t-on réellement par « crise » et « gestion de crise » ?

Louis Bernard : C’est vrai qu’aujourd’hui tout est considéré comme provoquant, faisant partie, ou étant provoqué par «la crise». On a recours à ce terme pour parler d’économie, de confiance, et même des personnes si bien que cela entretient une confusion réelle.

Mais la crise est un concept très précis. C’est un moment de dérèglement inattendu d’une organisation, dont les conséquences peuvent être destructrices, et qui impose de prendre des décisions rapidement, dans le flou, et sans toujours connaître l’étendue de leur portée.

Une crise se prépare, s’organise et se gère. C’est pourquoi le concept de «gestion de crise», en français, me paraît juste : manager la crise, c’est une gestion des entrées, des processus, et des sorties. La gestion de crise est l’ensemble des décisions prises et des actions entreprises par la cellule de crise afin d’en limiter les conséquences et d’en tirer les enseignements.

Qui est concerné ?

La crise ou les crises font désormais partie du quotidien de la vie des entreprises, petites et grandes. Un grand groupe peut disposer de tout un tas de procédures, de communicants chevronnés, des plans de continuité, peut-être même d’une Direction dédiée seulement à la gestion de crise. Un haut potentiel qui part à la concurrence, un accident de production, une action mal comprise qui écorne la réputation, un marché qui s’envole : ce sont là des moments de crise.

Mais les PME ne sont pas épargnées, bien au contraire ! Un retard de livraison, ou de trésorerie, une coupure d’électricité suite à une tempête, le vol d’un ordinateur portable contenant tous les secrets de fabrication lors d’un salon professionnel et c’est toute l’activité, donc tous les emplois de l’entreprises qui sont en jeu. Que ce soit une crise interne ou externe à l’organisation touchée, la manière dont elle va être gérée va déterminer les orientations futures de l’entreprise et du manager, à tous niveaux de responsabilité.

Comment définiriez-vous la gestion de crise ?

La gestion de crise est un procédé de gestion respectant chronologiquement des étapes majeures :
- la préparation  avec la création d’un plan de crise, puis l’exercice en simulation,
- le recueil d’informations le plus large possible,
- l’évaluation de la gravité de la situation,
- la création d’un « scénario du pire », le worst-case scenario, par lequel on évalue jusqu’à quel point les choses peuvent dégénérer. Cet exercice mental, plus fructueux quand il est fait en équipe, permet de proposer des solutions qui pourront parer à toute évolution,
- la prise de décision, qui se caractérise en mode crise par le fait qu’elle est à la fois obligatoire et forcément basée sur des informations parcellaires, ou au contraire surabondantes,
- l’action selon un ordre de priorité,
- la communication sur les décisions prises,
- la relecture de la crise, aussi appelé débriefing ou retour d’expérience.

Vous qui pratiquez la gestion de crise quotidiennement, quelle est, selon vous, la meilleure manière de se préparer à gérer une crise ?

Pendant plusieurs années, j’ai travaillé aux côtés de différentes entreprises et organisations pour les aider à créer des process afin de gérer les crises. C’est à la suite de ces nombreuses expériences que j’ai développé au travers de mon entreprise, Layer Cake, des programmes de formation à la gestion de crise destinés à toutes les entreprises qui souhaitent apprendre à gérer au mieux ces situations dans l’optique de devenir, par la suite, autonomes et indépendantes face à de tels cas de figure.

Quels sont avantages d’une telle formation pour l’entreprise ?

Le principal enjeu pour le manager est de transformer cette crise en une source de développement et d’opportunité et non pas de la voir seulement comme une menace. Un manager qui se forme et forme ses équipes à la gestion de crise est un manager qui s’organise pour tirer parti de la crise et ne pas la subir. C’est un manager dont l’entreprise sera prête à gérer n’importe quel événement qui surviendrait et pourrait la fragiliser et qui y fera face.

En période de crise, en quoi les attentes des entreprises concernant la formation sont-elles différentes ?

Souvent être en période de crise signifie vivre une période charnière. Pour les entreprises, c’est le moment où elles vont poursuivre leur développement en surmontant une  problématique de fond, grâce à de nouveaux projets, de nouveaux marchés, de nouvelles organisations du travail ; ou au contraire ne pas réussir à la dépasser.
Elles ont donc des besoins différents de formation pour leurs équipes. Former ses équipes est un investissement d’avenir pour une entreprise. C’est leur permettre d’acquérir de nouveaux savoirs et de nouvelles compétences qui renforceront l’entreprise et la rendront plus compétitive.

Avec Layer Cake nous répondons à ces nouvelles attentes en proposant des séminaires de formations sur mesure, sous forme de simulation d’une situation de crise industrielle, corporate, environnementale, de sécurité, de sûreté, ou encore multiculturelle. Adaptées en terme de scénario, de durée, d’organisation et de budget, aucune simulation jouée n’est identique et ce, quel que soit le client.

Quels sont selon vous les principes fondamentaux d’un programme efficace de formation à la gestion de crise ?

À mon sens, la mise en situation en est le principe fondamental. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la simulation est au cœur des formations de Layers Cake. Lorsque les collaborateurs sont placés en équipe, confrontés à un nouveau problème et accompagnés, ils trouvent eux-mêmes les solutions à ce problème.
On ne retient seulement 10% de ce qu’on lit, contre 90% de ce qu’on fait ! Une compétence acquise par la pratique est donc une compétence dont le taux de rétention est maximal. Sa réutilisation est immédiate, naturelle et permanente. Or précisément, la pédagogie de la simulation me paraît favoriser cette acquisition intuitive et pérenne de nouveaux savoirs, savoir-être et savoir-faire.

Par ailleurs, en étant l’acteur de sa formation, le salarié est impliqué directement dans l’apprentissage, sans perdre ni sa motivation ni sa concentration : c’est une pédagogie « par l’action ». Elle offre donc de très bons résultats tant dans sa finalité qu’au cours de son déroulement. Du reste, il me semble qu’elle est particulièrement adaptée à l’acquisition des compétences de gestion de crise qui se traduisent bien souvent par des gestes de travail quotidiens.

Arthur Fournier