Airbnb gagne face aux hôteliers qui l’accusent de concurrence déloyale



Mardi 22 Octobre 2024


Depuis plusieurs années, la plateforme de location touristique Airbnb est au cœur d’un conflit acharné avec les hôteliers français. Le principal syndicat du secteur, l’Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih), a porté plainte contre Airbnb pour ce qu’il considère comme de la concurrence déloyale. Le 21 octobre 2024, le Tribunal de commerce de Paris a néanmoins rendu une décision qui... donne raison à Airbnb.



Ce que l’on reproche à Airbnb : distorsion de concurrence et non-respect des réglementations

Les accusations portées contre Airbnb s’articulent principalement autour de l’idée que la plateforme bénéficie d’un avantage compétitif en échappant à certaines obligations légales imposées aux acteurs traditionnels du secteur hôtelier. L’Umih reproche à Airbnb de permettre à ses hôtes (particuliers louant leur logement) de ne pas se soumettre aux mêmes réglementations que les hôteliers. Premièrement, les hôteliers pointent du doigt le non-respect des règles encadrant la durée de location des résidences principales. En France, la législation fixe une limite de 120 jours par an pour la location de résidences principales via des plateformes comme Airbnb. Or, il est souvent reproché à la plateforme de permettre à certains hôtes de dépasser cette limite, créant ainsi une distorsion de concurrence.

Deuxièmement, l’Umih critique la collecte et le versement de la taxe de séjour, qu’elle juge mal appliqués par la plateforme. Selon le syndicat, certaines villes et communes ne bénéficieraient pas d’un reversement complet de cette taxe, privant ainsi les collectivités locales de ressources financières importantes. Enfin, les hôteliers dénoncent l’absence de numéros d’enregistrement pour les logements dans certaines zones géographiques, pourtant requis par les municipalités pour mieux contrôler l’activité des locations meublées.

La décision de justice : une victoire pour Airbnb, un revers pour les hôteliers

Le 21 octobre 2024, après plusieurs années de procédure, le Tribunal de commerce de Paris a finalement rendu son verdict dans l’affaire opposant l’Umih à Airbnb. Le tribunal a débouté l'organisation hôtelière, estimant que la preuve d’un préjudice direct et immédiat pour les membres de l’Umih n’avait pas été apportée.

Dans son jugement, le tribunal a notamment souligné que dans de nombreuses localités, les activités d’hébergement traditionnel et celles proposées via des plateformes comme Airbnb étaient complémentaires plutôt que concurrentielles. Il a également noté que les hôteliers ne pouvaient pas être considérés comme des victimes d’une quelconque "pénurie de logements" ou d'une "entrave à la mixité sociale", deux arguments souvent évoqués par les collectivités pour justifier une régulation stricte des locations meublées touristiques.

En outre, le tribunal a rejeté la demande de l’Umih visant à obtenir 1,5 million d’euros de dommages-intérêts, et a condamné l’organisation à verser 40 000 euros à Airbnb pour couvrir les frais de justice. L’Umih a d'ores et déjà annoncé son intention de faire appel, affirmant que la lutte pour un marché de l’hébergement plus équitable n’est pas terminée. Par ailleurs, d'autres actions similaires sont en cours. En juin 2024, une nouvelle plainte a été déposée par une vingtaine d’hôteliers devant le tribunal de commerce de Lisieux, invoquant une concurrence déloyale dans leurs régions respectives. Cette multiplication des contentieux judiciaires témoigne de la persistance des tensions entre hôteliers et plateformes numériques.


 

Paolo Garoscio