Acier : le Parlement britannique nationalise in extremis British Steel



Lundi 14 Avril 2025


Confronté à la menace imminente d’une fermeture des deux derniers hauts-fourneaux du pays, le Royaume-Uni a voté, samedi 12 avril 2025, une loi d’urgence permettant la prise de contrôle directe de British Steel, propriété du groupe chinois Jingye. Une décision sans précédent, tant sur le plan industriel que géopolitique.



Garder les deux derniers hauts-fourneaux sous pavillon britannique

Réuni en session exceptionnelle un samedi, fait rare depuis la Seconde Guerre mondiale, le Parlement britannique a adopté, le 12 avril 2025, une législation conférant au gouvernement le pouvoir de diriger les opérations de British Steel à Scunthorpe (nord de l'Angleterre). Le texte ne transfère pas formellement la propriété, mais permet à l’État d’intervenir directement dans la gestion de l’entreprise, d’acheter les matières premières et de garantir les salaires des quelque 3 500 employés. Keir Starmer, Premier ministre travailliste, a justifié cette mesure comme une action visant à assurer « la sécurité économique du pays ».

Selon Jonathan Reynolds, secrétaire d'État aux Affaires, à l'Énergie et à la Stratégie industrielle, le site sidérurgique subissait une perte quotidienne de 814 000 euros, Jingye ayant cessé ses commandes de boulettes de fer et de charbon à coke. L’arrêt des hauts-fourneaux, prévu pour début juin 2025, aurait été irréversible. « Sans intervention samedi, les hauts-fourneaux seraient en train de fermer », a-t-il déclaré devant la Chambre des communes.

Douanes américaines et tensions avec Pékin en toile de fond

L’usine de Scunthorpe, rachetée en 2020 par le groupe chinois Jingye, avait annoncé sa fermeture en raison de conditions de marché défavorables et de coûts environnementaux croissants. La société réclamait plusieurs centaines de millions de livres en aides publiques, que Londres refusait de verser sans garanties sur l’utilisation des fonds. « Jingye voulait beaucoup plus que ce que nous pouvions offrir », a souligné Jonathan Reynolds (L’Orient-Le Jour), évoquant un risque de transfert des fonds vers la Chine.

Face à cette situation, Pékin a exhorté Londres à ne pas « politiser » le dossier. Mais la réponse du Royaume-Uni a été claire : « La Chine n’est plus la bienvenue dans le secteur sidérurgique britannique », a ainsi affirmé avec fermeté Jonathan Reynolds. Le gouvernement entend mobiliser un fonds de 2,5 milliards de livres sterling (2,8 milliards d’euros) pour stabiliser la filière, sans augmenter les impôts. L’objectif : éviter que le Royaume-Uni perdre toute capacité de production d’acier primaire, ce qui serait une première parmi les membres du G7.


Axelle Ker